Michpatim

Une goutte de Torah – Année 11 – n° 541 – Michpatim

27 Chevat 5783 – 18 février 2023

La loi du talion

Cette semaine, nous nous heurtons à un passage qui a contribué à la réputation de cruauté de la Torah : “Œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied, etc.” (21:24-25).

Faut-il prendre ce passage à la lettre ?

Si quelqu’un a volontairement crevé l’œil de son voisin, doit-on lui appliquer le même traitement ?

La Torah écrite peut uniquement être interprétée et comprise avec l’aide de la Torah orale, c’est-à-dire le Talmud et les commentaires de nos Sages. Leur méthode d’exégèse permet d’interpréter les passages ambigus de la Torah, et donne la marche à suivre dans toutes sortes de situations possibles.

Le Talmud est catégorique : dans ce passage, la Torah parle d’une compensation financière (Baba Kama 83b et 84a). Cette interprétation n’a jamais été remise en cause par les commentateurs. Depuis 3000 ans, aucun tribunal Rabbinique n’a crevé un œil (ni extrait une dent, ou coupé une main ou un pied). Une telle unanimité est miraculeuse pour qui connaît l’amour de la controverse chez nos sages.

Mais alors, pourquoi une formulation aussi ambiguë ? Pourquoi laisser planer le doute au risque d’un total contre-sens sur l’esprit de la Torah ?

Rambam et d’autres commentateurs expliquent que la Torah nous transmet ici un message subtil : en réalité, le coupable mériterait de perdre son œil, car porter atteinte à l’intégrité physique de son prochain est un acte inexcusable. Mais D., dans Sa miséricorde, ne pouvait accepter une punition aussi barbare et la répétition d’un acte abominable, Il a donc prescrit une compensation financière.

Par contre, si la Torah l’avait mentionné clairement, le risque aurait été que le coupable, après avoir envoyé son chèque, se soit senti quitte et libéré de toute obligation, ouvrant la voie à d’autres violences.

La Torah garde donc cette formulation, en apparence cruelle, pour lui signifier que la compensation financière est imparfaite, et que le dommage qu’il a causé ne pourra jamais être totalement réparé.

Elle nous offre ici un message d’une grande modernité alors que d’autres traditions appliquent encore ce principe à la lettre.

Une histoire

Un homme sonne chez son voisin : « Je suis désolé, ma poule a abîmé votre potager. »

« Oh, ce n’est pas grave, mon chien a mangé votre poule. »

« Bon, alors on est quitte, je viens d’écraser votre chien. »

Chabbat Chalom

Jean Guetta

Relu et mis en page par Tania Guetta