Parachat Chémot

 Après avoir tué, et enterré discrètement, le contremaître égyptien qui frappait violemment un homme hébreu, , Moché « sortit le jour suivant, et remarqua deux hébreux qui se disputaient, il dit au méchant : pourquoi frappes-tu ton prochain ? L’autre répondit qui t’a fait notre seigneur et notre juge ? Voudrais-tu me tuer, comme tu as tué l’Egyptien ? » (Chémot II, 13-14). Rachi révèle ici que ces deux hommes sont Datan et Aviram, ceux-là même « qui n’écoutèrent point Moché et qui en laissèrent (de la manne) pour le lendemain » (Id. XVI, 20).

Il est surprenant, dit le Rav Chalom Chvadron zatsal, que Rachi n’ai trouvé que ce point à souligner : qu’ils sont ceux « qui en laissèrent pour le lendemain » !

C’est que Datan et Aviram vont ensuite dénoncer Moché Rabbénou (Midrach Tanhouma et Rachi sur le verset 15) au « Pharaon qui voulut alors le faire mourir » ; et c’est pourquoi Moché s’enfuit vers le pays de Midian.

Lorsque, des années plus tard, Moché et Aaron se rendront chez le Pharaon, pour lui demander de libérer les enfants d’Israël et que le Pharaon décidera d’endurcir leurs conditions de travail, ces mêmes Datan et Aviram viendront les rencontrer, pour les accuser d’être responsables du mal fait aux enfants d’Israël (Id V, 20, Rachi).

C’est encore eux, Datan et Aviram, face à la mer rouge, qui diront à Moché : « N’est-ce pas la chose que nous t’avons dite en Egypte, disant laisse-nous servir les Egyptiens ? Car mieux valait, pour nous, servir les Egyptiens, que périr dans le désert » (Chémot XIV, 12) (Midrach Raba).

La manne tombait et devait être consommée, au jour le jour, à l’exception du Chabbat, où la manne ne tombait pas (mais pour lequel, une double part tombait, le vendredi). Cependant, malgré tout, « le septième jour, quelques-uns du peuple allèrent pour récolter, mais ils ne trouvèrent rien » (Id.XVI, 27). Et le Midrach Rabba précise que, là encore, «  il s’agit de Datan et Aviram ».

Au retour des explorateurs, « ils se dirent l’un à l’autre : donnons-nous un chef et retournons en Egypte » (Bamidbar XIV, 4) : il s’agit également de Datan et Aviram (Midrach Rabba).

Enfin, on les retrouve, formant parti avec Kora’h, dans sa querelle contre Moché (Bamidbar XVI, 1).     

Le Rav Chvadron répond qu’il y a un fil conducteur dans le comportement et les propos de Datan et Aviram : une rébellion contre l’autorité de Moché, qu’ils justifient par le prétendu souci de préserver le bien-être du peuple d’Israël. Ils accusent Moché d’avoir mis le peuple en danger en tuant l’Egyptien. D’après le Sforno, ils ne s’étaient pas adressés directement au Pharaon, mais comme ils racontaient, autour d’eux, ce que Moché avait fait, afin de le délégitimer, le Pharaon finit par l’entendre. Ils ont tenté de soulever le peuple contre Moché et Aharon, dont l’intervention « irresponsable » pour la libération, aurait endurci le cœur du Pharaon. Face à la mer rouge, comme lors du retour des explorateurs, ils diront à Moché : « quel bien nous as-tu fait en nous tirant de l’Egypte ?»

C’est pourquoi, d’emblée, Rachi vient nous signaler : Datan et Aviram sont des réchaïm, ce sont ceux qui « ont laissé de la manne pour le lendemain ». En gardant une partie de cette manne, ils ont fauté intentionnellement, et transgressé les paroles de D… Ils ne peuvent pas prétendre s’être souciés du bien-être de quiconque, et ils dévoilent leur véritable nature … de querelleur.

Le Rav Chvadron poursuit et nous révèle que Datan et Aviram désiraient le pouvoir et se voulaient dirigeants du peuple. Leur première réaction aux paroles de Moché : « qui t’a fait notre seigneur et notre juge ? », est significative. C’est l’intrusion de Moché qui les dérange. Moché, sorti du palais de Pharaon où il a été élevé, et où il a grandi, en importance, le voilà qui intervient pour la deuxième fois et avec autorité. C’est pour cela qu’ils s’insurgent contre son pouvoir, ce qu’ils finiront par reconnaître, explicitement, accusant Moché de « prétendre encore (s’) ériger en maître sur nous » (Bamidbar XVI, 13).

Chabbat Chalom oumevorakh