Parachat KEDOCHIM

Dans la Paracha de Kédochim, le verset nous demande « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Vayikra 19,18). Rabbi Akiva enseigne que c’est là un principe fondamental de la Torah (Yérouchalmi, Nedarim 9,4). Nous connaissons tous aussi, la réponse de Hillel à cet homme qui voulait apprendre sur un pied toute la Torah, que tout se résume en un principe : (littéralement) « ce qui sur toi est haïssable, ne le fais pas à ton prochain … le reste n’est que son explication » (Chabbat 31a).
Mais peut-on vraiment aimer son prochain comme soi-même? Rabbi Akiva lui-même tranche qu’un homme n’est pas obligé de partager son eau, s’il se trouve dans le désert, avec juste la quantité qui lui serait suffisante. C’est que « ta vie est prioritaire sur celle de ton prochain » (Baba Métsia 62a).
Le Ramban répond qu’il s’agit là d’une exagération, car on ne peut exiger d’aimer l’autre comme soi-même. La Torah n’écrit pas, d’ailleurs, d’aimer « réakha » (ton prochain) mais « léréakha » (pour ton prochain). En fait la Torah nous demande de vouloir le bien de notre prochain comme nous voulons notre bien propre. Souhaiter à l’autre l’intelligence, le savoir, la réussite, la richesse… nous est facile, à condition de garder pour nous quelque supériorité. Ce commandement vient donc nous dire de mettre à égalité notre frère et d’enlever de notre coeur toute jalousie éventuelle.
Yonathan, le fils du roi Chaoul, aimait David comme lui-même (Chmouel I : 20,17), parce qu’il avait ôté de son coeur toute jalousie, jusqu’à renoncer à la royauté, pour lui-même: « Ne crains rien, la main de Chaoul mon père ne t’atteindra pas, tu régneras sur Israël et moi je serai ton second » ( 23,17).
Le Rav Desler zatsal explique (Mikhtav Mééliahou Tome 3, page 88) les paroles du Ramban: la Torah n’ordonne pas à l’homme de vouloir tout le bien pour les autres et pas pour lui-même, car ceci est impossible. Toutefois le caractère de l’homme est tel qu’il cherche à se démarquer de son entourage, et à affirmer sa particularité. Cette démarche lui est si importante qu’il ferait tout pour y arriver. Elle est révélatrice d’une touche de jalousie, d’une certaine « petitesse » d’esprit, desquelles il convient de s’écarter. Car qu’importe, au fond, que l’autre arrive aussi à la même grandeur et aux mêmes qualités.
Rav Desler donne aussi une autre explication à cette Mitsva. Il est habituel de penser que donner est un acte d’amour, motivé par cet amour dont il est un témoignage. Mais il y a aussi, en retour, un amour qui provient du don, car lorsqu’on donne à quelqu’un, on en vient à l’aimer. Le fait de s’intéresser à autrui, de s’en préoccuper, ou de lui donner quelque chose, projette en lui une part de nous-mêmes que nous n’aurons, bien sûr, aucune difficulté à aimer. C’est ce que nos Sages enseignent : « si tu veux aimer ton prochain recherche son bien » (Derekh Eretz zouta ch 2).

Chabbat Chalom Oumévorakh