Parachat VAYIGACH

        « Yossef dit au peuple : Oui, je vous ai acheté aujourd’hui, vous et vos terres, pour Pharaon. Voici pour vous des grains, ensemencez la terre ! Ce sera, aux récoltes, que vous donnerez un cinquième à Pharaon. Les quatre autres parts vous serviront à ensemencer les champs et à vous nourrir ainsi que vos gens et vos familles (…)Le domaine des prêtres seul était excepté, il ne relevait point de Pharaon. » (Beréchit XLVII, 23-24, 26).

Pourquoi préciser ces détails : du cinquième, des quatre autres parts, et aussi pour quelle raison Yossef fit une exception au domaine des prêtres de l’Egypte ?

Dans son livre Torat Haïm (Houlin 92a), le rav Avraham Haïm Chor zatsal, nous donne une explication particulière d’après le « Drach ». Le jour de l’alliance entre les morceaux, l’Eternel avait dit à Abraham (Id. XV, 13) : « Ta descendance séjournera sur une terre étrangère, où elle sera asservie et opprimée… » Et à la sortie d’Egypte, le verset dit : « Or le séjour des enfants d’Israël, depuis qu’ils s’établirent en Egypte, avait été de quatre cent trente ans. » (Chémot XII, 40). Curieux ! Car l’esclavage ne fut en réalité que de quatre-vingt-six ans, à compter depuis la naissance de Miryam, appelée ainsi à cause de la vie amère (mar) que commençait à subir le peuple d’Israël.    

Et donc, les enfants d’Israël ne furent en réalité esclaves, qu’un cinquième (86 ans) du temps qui avait été décrété (430). C’est la raison pour laquelle l’ange de l’Egypte les poursuivit (Midrach Rabba Chémot 21,5), arguant que le moment de sortie n’était pas encore arrivé. Pour la même raison, dit le Midrach Tan’houma, la mer rouge refusait de s’ouvrir. Ce n’est que lorsqu’elle vit le cercueil de Yossef que « la mer se mit à fuir » (Téhilim CXIV, 3).

Un cinquième, mesure pour mesure ! Yossef avait laissé aux égyptiens quatre cinquième des récoltes, alors qu’ils étaient tous les esclaves de Pharaon et n’auraient rien dû recevoir. En retour les enfants d’Israël furent aussi allégés des quatre cinquièmes de la servitude. Le cercueil de Yossef en était l’allusion et c’est pourquoi la mer s’ouvrit à sa vue. Yossef avait préparé l’exil des enfants d’Israël, en déplaçant les populations d’Egyptiens, et il les avait aussi contraints à se faire circoncire, afin que ses frères ne soient pas considérés comme des étrangers. L’exemption des prêtres était également une démarche en vue de préserver, en retour, mesure pour mesure, les Lévyim de l’esclavage, et la Midat Hadin, la Justice Céleste, sera clémente à leur encontre.

En regard, explique le rav Chor, à Péssa’h, nos sages ont instauré les quatre coupes de vin, le soir du seder. La coupe, « Koss » en hébreu a pour valeur numérique 86. Les quatre coupes représentent les quatre cinquièmes (86×4 = 344), années dont les enfants d’Israël ont été épargnés. Coupes de vin, car Yossef avait envoyé à son père du vieux vin, « Yayin Yachan » en hébreu, valeur numérique 430, allusion à la durée initialement prévue de l’esclavage. La Matsa qui doit être cuite rapidement, fait également allusion à la précipitation de la sortie d’Egypte. Nous en mangeons donc quatre morceaux, le soir du Seder : le Motsi, le Kazayit, le Korekh, et l’Afikomane.

Cependant ces quatre cinquièmes, ces années d’esclavage seront rattrapées par les quatre exils : ceux de Babel, de la Perse, des Grecs et celui d’Edom. C’est pourquoi, Moché dit à l’Eternel : « Ils me diront : Quel est Son Nom ? Que leur dirai-je ? » Les enfants d’Israël lui demanderont quel est Son Nom, le Nom Miséricordieux qui les fait sortir plus tôt. « L’Eternel répondit à Moché : Je serai qui serai ! » (Chémot III, 13-14). Moi qui suis avec eux dans la détresse présente, Je serai avec eux dans leur asservissement sous d’autres empires (Rachi). Il lui parla alors des quatre exils, promettant d’être avec eux pendant toute cette période.

Chabbat Chalom Oumévorakh