PESSA’H

Le soir de Pessa’h, au seder, nous lirons dans la Haggada, le fameux Avadim Hayinou « nous étions esclaves de Pharaon en Egypte, et l’Eternel nous a sorti d’Egypte d’une main puissante » (Dévarim VI,21).

Lorsque l’Eternel nous fit sortir, Il nous acheta des mains du Pharaon, comme il est dit : « car c’est à moi que les enfants d’Israël appartiennent comme esclaves; ce sont mes serfs à moi qui les ai tirés du pays d’Egypte, Moi, l’Eternel votre D… » (Vayikra XXV,55). Ce verset est rapporté à propos de celui qui s’est vendu comme esclave par manque de moyens. La Torah ordonne de le libérer l’année du jubilé parce que les enfants d’Israël sont les esclaves de D…, et comme le rapporte Rachi, l’Eternel souligne « c’est à moi qu’ils sont les serviteurs ; mon titre de propriété est antérieur », qui date de la sortie d’Egypte.

Pourtant dans nos prières nous disons quotidiennement : « Il a sorti son peuple Israël pour la liberté éternelle » ( את ויוציא עולם לחירות ישראל עמו .(Et dans la Haggada nous lisons aussi « Il nous a fait sortir de la servitude à la liberté ». ( מעבדות הוציאנו לחירות)

Nous avons donc quitté le statut « d’esclaves des Egyptiens » pour celui « d’esclaves de D… », mais alors, de quelle véritable « liberté éternelle » jouissons-nous ?

Le Rav Chimchon Pinkous zatsal nous donne une réponse. C’est à l’intérieur des limites que D… lui a fixé que l’homme est tout à fait libre. La poule dans son poulailler ne se sent pas à l’étroit, ni emprisonnée, elle est dans ses limites, qu’elle connait depuis sa naissance. Dans des conditions analogues, l’homme, en prison, bien que « logé et nourri », souffre d’être enfermé et privé de liberté.

Le roi David, avant de mourir, dicta ses volontés à son fils Salomon. « …Chimei fils de Guéra… celui-ci m’accabla des plus cruels outrages lorsque je me retirai à Mahanaïm… et bien ne le laisse pas impuni, car tu es un homme avisé… et tu feras descendre, dans le sang, sa vieillesse dans la tombe » (Mélakhim I, chapitre II, 8-9). Que fit le roi Salomon? Il fit appeler Chimei et lui dit : « édifie-toi à Jérusalem une maison où tu demeureras, et tu ne la quitteras pas ; le jour où tu en sortiras, où tu franchiras le torrent de Kidronne, saches bien que tu mourras et que tu seras l’auteur de ta perte » (idem 36-37). Trois ans plus tard, deux de ses esclaves s’étant enfuis, Chimei sortit à leur recherche, et le roi Salomon trouva alors la possibilité de le tuer.

S’il n’était pas sorti, comment Salomon aurait-il pu accomplir la volonté de son père? A sa création le premier homme « scrutait » le monde d’un bout à l’autre (Haguiga 12a) ; après la faute, ses horizons lui ont été fixés, les réduire davantage, c’est entraver sa liberté. L’homme qu’on priverait d’aller sur la lune, ne se sentirait pas prisonnier sur le sol terrestre, car la lune ne fait pas partie de son champ d’exercice.
Par contre en interdisant à Chimei de sortir de Jérusalem, on le privait d’une liberté, qu’un jour ou l’autre il chercherait à recouvrer. Le Roi Salomon était donc sûr qu’il pourrait le tuer. Nos sages enseignent : « il n’y a d’homme libre que celui qui se consacre à la Torah » (Avot ch 6,2). C’est Elle qui définit les limites de l’homme dans ce monde. Dans ce cadre, l’homme en toute liberté agit comme bon lui semble. Respecter ce cadre, c’est en fait ce que l’Eternel nous demande en disant : « car c’est à moi que les enfants d’Israël appartiennent comme esclaves ».
De ce fait, nous sommes indépendants de toute contrainte extérieure, qui nous serait imposée, car l’Eternel nous a fait sortir de l’esclavage à la liberté, de la servitude à la rédemption.

Pessa’h Cacher et Samea’h