Parachat BEHAR BE’HOUKOTAI

« Quand vous serez entrés dans le pays que je vous donne (…) la septième année un chômage absolu sera accordé à la terre (…) Ton champ tu ne l’ensemenceras pas et ta vigne tu ne la tailleras pas » (Vayikra XXV,4).

Le travail de la terre devra donc se faire par cycle de six années de culture suivies d’une année de chemita, de repos, pour la terre. Cependant la cinquantième année, l’année du jubilé, est aussi interdite de travail agricole (idem 11) ce qui nous donne deux années consécutives de jachère, la quarante neuvième du fait de la chemita et la cinquantième du fait du jubilé.

Quelques versets plus loin il est précisé : «Si vous dites : Qu’aurons-nous à manger la septième année puisque nous ne pouvons ni semer ni rentrer nos récoltes ? J’ordonnerai Ma bénédiction pour vous dans la sixième année, tellement qu’elle produira la récolte de trois années. » (idem 20-21)

La bénédiction Divine n’interviendrait donc qu’à notre demande expresse, dans l’inquiétude du lendemain ! Mais autrement, comment les enfants d’Israël pourraient-ils survivre en l’absence d’abondantes réserves ? Quel était donc le projet initial de D… ?

Le Sforno explique que si les enfants d’Israël, confiants en l’Eternel, avaient observé le silence, la simple récolte de la sixième année aurait suffi à les nourrir ces trois années. Comme nous enseignent nos Sages (dans Torat cohanim) la bénédiction se serait trouvée dans les entrailles. C’est-à-dire que chacun aurait été rassasié et bien nourri par une petite quantité, comme au désert avec la Manne, une même quantité convenant au grand comme au petit. La bénédiction aurait donc été bien meilleure, dans la qualité de la nourriture, et non dans sa quantité.

Lorsque l’homme s’interroge, quant à sa subsistance pendant l’année de la Chémita, c’est qu’il doute de la Providence divine et de Sa bienveillance initiale. Il ne mérite plus alors d’en être bénéficiaire. S’il doit recevoir une bénédiction, elle sera autre et moins grande que celle prévue. Certes la récolte de la sixième année sera très abondante et lui servira les trois années à venir. Il pourra le constater de ses yeux admiratifs. Trois années de récolte, ramassées en une seule fois est un grand miracle, mais un miracle dévoilé. Par contre, lorsque le miracle est caché, la bénédiction est de meilleure qualité et son degré spirituel beaucoup plus élevé.

Le Rav Elihaou Lopian zatsal nous dit qu’il en est ainsi de tout notre relationnel avec le Créateur et pas seulement en ce qui concerne la Chemita. C’est ce que traduit le verset en disant « l’Eternel est ton ombre… » (Téhilim 121,5). Le Midrach explique : « à la manière de ton ombre », lorsque tu tends un doigt ton ombre montre un doigt, et lorsque tu tends un deuxième ton ombre porte deux doigts. Ainsi D… se conduit avec l’homme en fonction de sa Emouna.

Dans la vie de tous les jours, l’homme qui a mis toute sa confiance dans l’Eternel peut espérer recevoir en retour Sa bénédiction telle qu’une petite quantité puisse suffire largement à tous ses besoins. Plus encore, tout le peuple d’Israël profite de son mérite comme il est dit à propos de Rabbi Hannina Ben Dossa : une voix du ciel fit entendre « le monde entier est nourri par le mérite de Hannina mon fils, et Hannina mon fils, lui, se suffit d’une petite mesure de caroube d’un Chabbat à l’autre » (Taanit 24).

Parachat BEHOUKOTAI

« Pour la dîme quelle qu’elle soit, du gros et du menu bétail de tous les animaux qui passeront sous la verge, le dixième sera consacré à l’Eternel » (Vayikra XXVII, 32).

Par ce verset la Torah nous demande de prélever, une fois par an, la dîme, sur les bêtes nées dans l’année. Pour ce faire, on faisait sortir de l’enclos les petits nouveaux par une porte étroite, ne laissant passer qu’un seul animal à la fois. Il fallait alors compter les bêtes sortantes, l’une après l’autre, jusqu’à la dixième qui était marquée de peinture rouge et mise de côté.

On peut s’étonner de l’importance que donne la Torah à ce passage sous la verge, et du temps qu’elle nous demande de consacrer pour cette seule activité. La dîme des bêtes de Rabbi Eléazar ben Azaria, était de douze mille têtes (Guémara Chabbat 56). Ne pouvait- il pas saisir une partie de son troupeau, de manière approximative, plutôt que de passer une à une les cent vingt mille nouvelles bêtes de son cheptel ? Ou encore comptabiliser l’ensemble et donner le dixième en une seule fois?

On pourrait poser la même question sur les différentes ponctions effectuées sur les récoltes chaque année : un dixième pour les lévites et un autre pour les pauvres. Et là aussi nos maitres nous enseignent l’interdiction de prélever de manière approximative.

Le Talmud (Taanit 9a) nous précise l’importance de ces prélèvements et leur récompense pour l’homme dans ce monde. « Asser Téasser, tu prélèveras la dîme de toute la récolte de ta semence » (Dévarim XIV, 22). Ce terme, redoublé, utilisé par la Torah, vient nous apprendre (Asser =) prélève afin de (Titacher =) t’enrichir.

Les Tossafot rapportent sur place une histoire (du Midrach Tanhouma) : un homme qui avait un champ produisant mille kours (mesure importante), donnait chaque année cent kours aux pauvres. Avant de mourir il recommande à son fils de veiller à prélever la dîme du champ, comme il le faisait, lui-même, de son vivant. Le fils sème, récolte, et donne les cent kours aux pauvres. Mais la deuxième année, il a du mal à se défaire d’une quantité à prélever encore plus abondante et garde la dîme par devers lui. L’année suivante le champ n’a produit que cent kours. Comme il en était très attristé ses proches lui dirent alors : « tu es toi-même responsable de ce qui t’arrive ; jusqu’à ce jour tu étais maitre de ton champ et D… était comme le Cohen pour qui tu prélevais un dixième donné aux pauvres. Puisque tu ne l’as pas fait, D… a repris son terrain car c’est lui le véritable propriétaire. Dorénavant, le cohen c’est toi et tu ne reçois qu’un dixième de la récolte ».

On peut très bien comprendre la difficulté que l’homme éprouve quand il lui faut donner de grosses quantités. Ce que la Torah vient ici nous enseigner, c’est qu’en faisant passer une à une les bêtes de son troupeau, la Torah dit à l’homme : « la première est pour toi, la seconde aussi, la troisième, la quatrième… vient la dixième tu peux tout de même la donner à D… qui t’a offert tout cela ». Et ainsi de suite pour la totalité du troupeau. L’homme découvre alors, s’il en était besoin, les bienfaits de l’Eternel à son égard et le peu qui lui est réclamé. Reconnaissant, il apportera sa contribution avec empressement et avec joie.

Shabbat Shalom Oumevorah