Notre Paracha rapporte les lois sur les animaux permis à la consommation et sur ceux défendus. L’interdit ne relève pas d’un souci hygiénique, comme certains le croient, mais il est d’ordre strictement spirituel. « Car je suis l’Eternel votre D… vous devez donc vous sanctifier et rester saints parce que Je suis saint, et ne vous rendez pas impurs par tous ces reptiles qui se meuvent sur la terre » ( Vayikra XI, 44 ).
La Guemara Yoma (82, b) nous enseigne que le jour de Kippour, une femme enceinte, qui ayant senti une bonne odeur serait prise d’un besoin irrésistible de manger, est autorisée à couper le jeûne, pour ne pas mettre en danger la vie du foetus. Rébbi suggéra de lui chuchoter à l’oreille : «c’est Kippour aujourd’hui » et peut être que le foetus se calmera. C’est ce qui arriva. Rébbi cita à son sujet le verset : « Avant que je t’eusse formé dans le sein de ta mère je te connaissais » (Yérmiya I, 5). Cet enfant devint Rabbi Yohanan. Pour une autre femme qui, finalement, ne put se retenir, Rébbi rapporta un autre verset : « dès le sein de leur mère les méchants sont fourvoyés » (Téhilim LVIII, 4). L’enfant fut le fameux Chabataï, qui engrangeait la récolte et tardait à la vendre pour faire monter les prix, au détriment des pauvres.
Cette Guémara peut surprendre qui range la faute dans la relation horizontale de l’homme à son prochain. On s’attendait plutôt à ce que cet enfant « méchant », plein d’avidité, devienne un Rachàa qui transgresse en premier les interdits alimentaires.
Quel rapport peut-on trouver entre la transgression de Kippour et le fait de causer du tors à ses semblables ?
Le Rav Yaakov Neyman zatsal, Roch Yéchiva de Péta’h Tikva, répond dans son livre Darké Moussar, que de là nous apprenons qu’il importe d’être sensible aux besoins de son prochain, et qu’il convient de ne pas rechercher notre intérêt personnel à nous enrichir s’il nous fallait causer aux pauvres de la perte.
La Torah nous demande : « Soyez saints » (Vayikra XIX, 2) et Rachi d’expliquer, par le fait de nous restreindre dans ce qui nous est permis. L’homme qui n’est pas maître de lui-même, qui est entrainé par ses passions et soumis à ses pulsions manque de sainteté. Le foetus qui pousse sa mère à manger le jour de Kippour ne sera pas capable, une fois grand, de refreiner ses désirs. Tellement préoccupé de sa petite personne, il aura beaucoup de mal à penser aux autres, et replié sur lui-même, il ne viendra pas en aide à son prochain.
C’est aussi ce que nous enseigne Rabbénou Yona sur le verset : « l’homme qui s’isole ne fait que suivre ses caprices » (Michlé XVIII, 1). C’est-à-dire que celui qui est à la merci de ses envies, ne pourra donner à l’autre et se trouvera isolé du monde.
La Guémara (Beérakhot 20,a) rapporte que Rabbi Yohanan, qui était particulièrement beau, avait l’habitude de s’assoir face à la porte du Mikvé (bain rituel) afin que les femmes le regardent à leur sortie et qu’elles puissent enfanter de beaux enfants comme lui. Rabbi Yohanan avait les paupières lourdes et gardait les yeux fermés, cependant sa place n’était certainement pas à cet endroit. Mais Rabbi Yohanan était prêt à renoncer à son honneur et prenait de son temps afin que naissent de beaux enfants dans le peuple d’Israël. Lui, qui avait su renoncer à toute convoitise déjà dans le ventre de sa mère, et ne l’avait pas amenée à transgresser le jour de Kippour, était apte et enclin à d’abord penser aux autres.