« Og, le roi de Bachan, s’avança à leur rencontre, lui et tout son peuple, pour leur livrer bataille, à Edréi. Mais l’Eternel dit à Moché : ne le crains pas, car je le livre en tes mains, lui et tout son peuple, et son pays ; et tu le traiteras comme tu as traité Si’hôn, roi des Amorréens, qui résidait à ‘Hechbon.» (Bamidbar XXI, 33-34).
« Ne le crains pas » ! Moché aurait-il craint d’affronter Og ? Pourquoi, s’interrogent nos Sages (Talmud Nida 61a), Moché aurait-il eu davantage peur de Og que de Si’hôn ? Les deux géants Og et Si’hôn étaient frères ; Si’hôn et son armée venaient d’être facilement vaincus par les enfants d’Israël !
C’est que Og allait peut être bénéficier du mérite d’Abraham, comme il est écrit : « vint le fuyard et l’annonça … (à Abraham que Lot, son neveu, avait été fait prisonnier par les quatre rois) » (Béréchit XIV, 13). Or ce « fuyard » n’est autre que Og, rescapé du déluge, et réchappé des Réfaïm, que (les quatre rois) Kédorlaomer et ses alliés avaient vaincus, comme il est dit : « seul Og, roi de Bachan, est resté des Réfaïm » (Dévarim III, 11).
Les motivations de Og, ce jour-là, étaient pourtant mauvaises : il convoitait Sarah et espérait qu’Abraham serait tué à la guerre et qu’il pourrait alors l’épouser (Rachi au nom du Midrach Rabba 42, 8). Bien que ces intentions perverses lui aient été révélées, Moché craignait que Og n’ait, malgré tout, gagné quelque mérite.
L’armée des quatre rois comptait plus de deux millions et demi de soldats (Sanhedrin 95b) et Abraham ne put les vaincre qu’avec les miracles que l’Eternel lui accorda ce jour-là (Taanit 21a). Pour les non-juifs, l’intention de faire le mal leur est comptée, comme s’ils l’avaient réalisée (Yérouchalmi Péa). Ils sont également coupables pour avoir causé un meurtre même indirectement (Rambam) ! On ne peut donc que s’étonner, nous dit le Rav Yaakov Galinski zatsal, que le mérite d’avoir informé Abraham, de la captivité de Lot, puisse encore protéger Og, d’autant plus qu’il avait été déjà récompensé par quatre cents ans de règne au pays de Bachan !
La réponse est en fait très simple, nous explique le Rav Galinski. Quand bien même l’action de Og n’était pas accompagnée d’une bonne intention, il aura, malgré tout, participé à la sanctification du Nom Divin, lorsqu’Abraham remporta la guerre ! Et pour ce faire il méritait une grande récompense.
Nous trouvons des exemples similaires ailleurs, à plusieurs reprises :
« Pharaon fit approcher, et les enfants d’Israël levèrent les yeux, et voici que l’Egypte était à leur poursuite, ils eurent très peur… » (Chémot XIV, 10). Pharaon « fit approcher» ? Il aurait fallu écrire «s’approcha». Nos Sages répondent (Midrach rabba 21,5) qu’il fit rapprocher les enfants d’Israël de leur Créateur, en Téchouva, car ils « levèrent les yeux » vers le Ciel en implorant. Et par ce mérite, bien que le Pharaon était venu pour les attaquer, il fut sauvé, et devint par la suite roi de Ninive, dont les habitants (au passage de Yona) firent eux aussi Téchouva, grâce à lui.
Lorsqu’Ahachvéroch enleva sa bague pour la remettre à Haman, lui donnant ainsi le pouvoir de disposer des juifs, les enfants d’Israël firent repentance à un niveau des plus élevé. Ce que les quarante-huit prophètes et les sept prophétesses d’Israël n’ont jamais réussi à provoquer. Cet élan d’acceptation totale, de la Torah avec joie et amour, sera décrit comme sa véritable réception. Haman en fut récompensé, mesure pour mesure : ses petits-enfants étudièrent la Torah à Bné Brak (Guittin 57b). .
Rabbi Akiva était descendant de Sisra (Sanhédrin 96b). Sisra bien qu’il perdit la guerre, qu’il menait contre les juifs, mérita cette récompense parce que le Nom Divin fut sanctifié, à travers le récit et la chanson de Déborah.
Nous voyons que D… accorde de grandes récompenses, aux actions de l’Homme, même les plus mauvaises, si leurs répercussions sont positives. A fortiori, l’accomplissement des mitsvots sera récompensé et infiniment plus.
Chabbat Chalom Oumévorakh