Parachat ‘Houkat
Après le décès de Aaron, les enfants d’Israël rebroussèrent chemin « en direction de la mer des joncs … Le peuple perdit courage pendant cette marche, et se plaignit de D… et de Moché : pourquoi nous avez-vous tirés de l‘Egypte pour nous faire mourir dans ce désert ? Car il n’y a point de pain, point d’eau et nous sommes excédés de cet aliment misérable (la manne). L’Eternel envoya alors des serpents venimeux qui mordirent le peuple et il périt une multitude en Israël. (Bamidbar XXI, 4-6)
Généralement, lorsque la Torah utilise le terme peuple (Am), c’est pour désigner les hommes simples, alors que le terme Israël s’adresse aux gens importants : les ‘hakhamim et les dirigeants. Ici, curieusement, le verset nous dit que c’est le peuple qui parla contre D… et Moché, mais qu’il périt une multitude en Israël ! Le ‘Hafetz ‘Hayim, qui relève cette question, répond que lorsque le peuple faute, c’est aux dirigeants et aux ‘hakamim qu’est fait le reproche. Pourquoi n’ont-ils pas usé de leur influence et ne sont-ils pas intervenus ? C’est pourquoi ces hommes importants d’Israël seront punis les premiers.
« Le peuple vint vers Moché et lui dit : nous avons péché en parlant contre l’Eternel et contre toi, intercède auprès de l’Eternel pour qu’Il détourne de nous ce serpent » (Id. XXI, 7). Mais l’Eternel envoya desserpents venimeux, or les enfants d’Israël demandèrent « qu’Il détourne (d’eux) ce serpent ! » comme s’il n’y en avait qu’un seul !
Le ‘Hafetz ‘Hayim répond que lorsque quelqu’un faute, il crée un ange accusateur, qui se retournera contre lui. Cet ange (silencieux) n’a pas besoin de s’exprimer, son existence est en soi une accusation contre celui qui l’a créé. Mais pour le péché du Lachon Harà, (la médisance), commise ici à l’encontre de l’Eternel et de Moché, l’ange ainsi créé ne sera pas accusateur par sa seule présence. Doté d’une bouche et d’une langue, c’est en procureur devant le Tribunal céleste qu’il demandera sans cesse justice.
C’est ce que le Midrach nous enseigne (Yalkout Chimoni ki tétsé 933) : l’Eternel dit qu’Il protège l’homme de tous les malheurs qui s’abattent sur lui, mais « pour le lachon harà Je n’interviens pas ! » Parabole « d’un homme très riche qui avait pour ami un petit villageois, désireux de lui rendre visite. Ce notable, possesseur d’un gros chien mordeur, très dangereux, recommande alors au villageois : mon ami je suis prêt à t’aider pour tous tes problèmes, ne craint pas tes créances, mais fais bien attention au chien, évite-le dès que tu l’aperçois ! ». Ainsi dit l’Eternel : « qu’il survienne six calamités, Il t’en préservera et lors de la septième le mal ne te touchera pas … Mais du fouet de la langue met-toi à l’abri » (Iyob V, 19 et 21).
Lorsqu’un ange, créé par une quelconque faute, se présente au Tribunal céleste, l’Eternel dans Sa grande miséricorde l’ignore, le laisse en attente, comme nous le demandons dans la prière du soir : « enlève le Satan de devant et de derrière nous ». Mais celà, uniquement pour les anges créés sans bouche, sans parole, car l’ange né du lachon harah s’exprime et réclame justice, même placé de côté il va sans cesse crier de son endroit, et on ne peut l’ignorer.
Quand les enfants d’Israël demandent à Moché d’écarter « le serpent », il s’agit de cet ange-procureur qu’ils appellent serpent, (nahach) parce qu’il leur vaut d’être mordus par les serpents venimeux. Moché leur répondit que ce n’était pas en son pouvoir (de prière, comme il avait pu arrêter la plaie des grenouilles), car on ne peut faire abstraction de ses paroles. Seule la Téchouva, le repentir individuel peut effacer la faute. C’est pourquoi D… demanda à Moché de « fabriquer un serpent (en airain) et de le placer au haut d’une perche ». Tout celui qui levait les yeux vers le haut et soumettait son cœur à Hachem était sauvé (Roch Hachana 29).
De même, lorsqu’un homme accompli une mitsva, il génère un ange, qui sera présent pour le défendre, et s’il s’agit d’une mitsva réalisée par la parole, cet ange là, proclamera haut et fort les mérites de celui qui l’aura créé.