Parachat MATOT-MASSE

Au début de la paracha de Massé, alors que la Torah nous décrit « l’itinéraire des enfants d’Israël depuis qu’ils furent sortis du pays d’Egypte », elle s’interrompt pour intercaler et nous signaler la mort « d’Aharon le pontife, (qui) monta sur cette montagne par ordre de l’Eternel et y mourut. C’était la quarantième année du départ des Israélites du pays d’Egypte, le premier jour du cinquième mois » (Bamidbar XXXIII, 38).

« Le premier jour du cinquième mois » c’est-à-dire le premier du mois de Av. Jamais dans toute la Torah (pentateuque), on ne trouve mentionné le jour précis du décès de quiconque, à l’exception de celui d’Aharon, (dans notre paracha).

Le Tour (Orah Haïm ch 580) précise que le premier Av est un jour de jeûne pour les Tsadikim, bien que généralement, il soit interdit de jeûner, un jour de Roch Hodéch. C’est certainement, explique le Rav Pinkous zatsal parce que Aharon était l’homme qui aimait la paix et la recherchait, « ohev chalom vérodef chalom » et que sa disparition a laissé un grand vide dans le monde. Après lui, l’amour et la recherche de la paix n’auront plus d’équivalents.

« Dès qu’entre le mois de Av, on diminue les joies » (Taanit 26) : parce que ce jour marque le début de la destruction (‘horban) du Temple et celui de l’Exil du peuple juif. La raison du ‘horban fût la haine gratuite, génératrice de disputes, de divisions et de confrontations destructrices (Yoma 9b). S’il coïncide justement avec la mort d’Aharon, c’est que sa disparition en est la source.

Hillel enseignait (Pirké Avoth ch 1, 12) : « sois parmi les élèves de Aharon, qui aimait la paix et la recherchait ». Parmi ses élèves ? A-t-on vraiment besoin d’un maitre pour ce faire ? Quel était l’enseignement particulier de Aharon sur le Chalom, cette paix nécessaire et bienfaitrice ?

Le rav Pinkous répond que d’une manière générale, l’homme aime l’action, les discussions et les débats ! La paix et le calme peuvent lui apparaitre comme ennuyeux et il en viendrait à les fuir. De façon surprenante, aux moments des disputes, nombre de personnes, apparemment discrètes et jusque là réservées, dans l’ombre, apparaissent sur la scène, en pleine lumière, pour intervenir, et surtout affirmer haut et fort leurs idées, qu’elles entendent imposer aux autres. Il fallait donc un grand maître comme « Aharon », pour servir d’exemple, enseigner les bienfaits de la paix et la rendre attractive, pour toutes les générations à venir, une fois instruites de sa façon d’agir.

Le Maharal de Prague (Nétsah Israël ch 4) explique qu’au deuxième Temple la Présence divine, à son niveau de « Chékhina », ne résidait pas (Yoma 21b); ce Beth hamikadach était basé sur « l’Elan venant du bas ». C’est la sollicitation des enfants d’Israël qui provoquait en retour la réponse du Ciel. L’unité réalisée au sein du peuple se traduisait au Temple par la présence d’un seul Autel, avec pour les sacrifices publiques l’intervention d’un seul Cohen, représentant tous les enfants d’Israël, en quelque sorte réunis en lui. C’était le travail des Cohanim d’unir à chaque korban, cohanims, léviyims et Israëlims, et de rattacher ainsi, toute la création représentée, au Créateur. On comprend mieux pourquoi la haine gratuite, responsable de désunion, s’est trouvée être la cause de la destruction, non pas tant par punition, mais parce que privé de ses éléments fondateurs le Temple n’avait plus sa raison d’être.

L’animosité réciproque de Kamtsa et Bar Kamtsa rapportée dans le Talmud ( Guittin 55b) comme une des raisons de la destruction du Temple, en est une illustration. Le Maharal (ch 5) explique que le mot Kamtsa provient du mot Kometz qui signifie séparé, séparer un morceau de l’offrande de sa totalité, ou encore du mot léKematsim (en petits morceaux), qui désigne la séparation et le manque d’unité.

Aussi pour mériter la délivrance finale, il est indispensable de rechercher et de renforcer l’amour de l’autre. Etre un « Ohev chalom et un rodef chalom » nous fera retrouver l’unité du Am Israël et nous permettra d’accueillir bientôt, d’un même cœur, le roi Machia’h. Amen !

Chabbat Chalom Oumévorakh