Le métsora (le lépreux), une fois guéri de sa lèpre, devra suivre une procédure de purification, très particulière. Il apportera « deux oiseaux vivants, (…) le cohen ordonnera qu’on égorge l’un des oiseaux, au dessus d’un vase d’argile, sur de l’eau vive. Pour (l’autre) l’oiseau vivant, (il sera) lâché dans la campagne (…). Le huitième jour, il prendra deux agneaux sans défaut, (…) et un log d’huile… » (Vayikra XIV, 4-10).
On lui mettra du sang, du premier agneau sacrifié, « sur le lobe de l’oreille droite, sur le pouce de sa main droite et sur l’orteil de son pied droit ». On lui appliquera l’huile, également, aux mêmes endroits. Le reste de l’huile sera posé sur sa tête. La Torah ne donne pas la raison de ces lois si singulières. Il convient de s’interroger sur la signification de ces protocoles.
Le Rav Meir Simha de Dvinsk, dans son Méchekh Hokhma, rapporte la Guémara (Kétouvot 5b) qui explique pourquoi les doigts de l’homme se trouvent allongés : « pour nous boucher les oreilles avec, lorsqu’on risque d’entendre de mauvaises paroles ». Seul le lobe de l’oreille est tendre, nous précise la Guémara, et peut se plier pour venir boucher le conduit de l’oreille. La Torah ordonne l’application du sang et de l’huile au lépreux, sur le lobe et sur le pouce, pour lui rappeler que sa lèpre est due au lachon harah, à la médisance, qu’il a entendue, alors qu’il aurait pu l’éviter s’il avait utilisé ces membres, comme il se doit. Certains rajoutent que pour l’orteil du pied, la raison est qu’il aurait dû prendre la fuite, pour éviter d’écouter des paroles méprisables.
Le Hafetz Haïm explique pourquoi l’on verse le reste de l’huile sur la tête du métsora, parce qu’après avoir entendu du lachone hara sur son prochain, il aura certainement pensé du mal de lui. L’huile, qui représente la sagesse, lui sera versée sur la tête, siège du cerveau, et de l’entendement.
Le rav Galinski zatsal s’étonne : nos Sages nous enseignent (Arekhin 15b), à propos du verset « voici quelle sera la règle imposée au métsora », que le mot métsora est l’acrostiche de « motsi chem ra » (qui calomnie), pourquoi donc ne fait-on rien sur la langue ou sur la bouche du lépreux, qui aura mal parlé d’autrui?
C’est qu’en fait répond le Rav, quand le lépreux va se repentir, on lui demandera de rechercher la source de sa faute, la raison qui l’a amené à cette mauvaise conduite. Lorsque l’Eternel demanda à Adam Harichon, s’il avait mangé du fruit de l’arbre interdit, il répondit : « la femme, que Tu as mise près de moi, c’est elle qui m’a donné du fruit de l’arbre, et j’ai mangé » (Béréchit III, 12). Le Saba de Kélém explique qu’Adam ne cherchait pas à se justifier, mais recherche en profondeur la raison de son égarement. La véritable Téchouva commence par le renoncement à la conduite fautive et ensuite à la regretter. Il dit à D… : « Je suis un homme facilement influençable ; par la femme, que tu m’as associée, j’ai fauté et je risque fort de continuer. Je ne peux pas me détacher de la faute et donc ma Téchouva ne sera pas sincère » (Midrach Rabba 19, 12).
C’est pourquoi concernant le lachon Hara, la Torah ne va pas ordonner d’appliquer à l’homme, quoi que ce soit, sur la bouche ou la langue, mais l’invitera à s’interroger sur la source de son comportement, l’origine de sa faute. Il apportera donc deux oiseaux, comme l’expliquent nos Sages (Arekhin 16b) et que rapporte Rachi au verset 4 : « la médisance étant la conséquence du bavardage, le texte a imposé pour sa purification des oiseaux, qui passent leur temps à caqueter en babillant » ( Rachi verset 4). Le premier sera égorgé sur de l’eau vive, qui fait allusion à la Torah (Baba Kama 17a), pour lui faire passer le message que la parole doit être utilisée pour l’Etude. Le deuxième sera lâché vivant dans la campagne, pour nous rappeler que le bavardage est sans intérêt et qu’on doit s’en éloigner. Après quoi lorsque l’homme aura réparé la source même de sa conduite, il en sera complètement purifié.
Chabbat Chalom Oumévorakh