Une goutte de Torah – Année 12 – n° 593 – Téroumah
8 Adar I 5784 – 17 février 2024
Cette goutte de Torah est dédiée au succès de nos vaillants soldats dans leur lutte pour l’annihilation de nos ennemis et le retour de nos otages sains et saufs B’H’.
Construire ensemble
A partir de cette semaine, et jusqu’à la fin du livre de l’Exode, la Torah décrit la construction du Tabernacle, ce petit Temple portatif qui accompagnait les Hébreux dans leurs pérégrinations dans le désert. Il devait impérativement être une œuvre collective : tout le monde était invité à offrir les matériaux nécessaires (25:2) et tous ceux qui étaient volontaires pouvaient participer à sa construction (36:1-3). Pour être certains que tous seraient impliqués, la Torah instaura même un impôt d’un demi-chekel d’argent par tête destiné à construire les socles du Tabernacle (38:26-27).
En fait, à ce moment de leur histoire les Hébreux étaient très riches car, en quittant l’Egypte, ils l’avaient vidé de ses trésors (12:36). Comme dans d’autres traditions (Romains ou Hindous, par exemple), ils auraient pu chacun se construire de petits temples domestiques, ou chaque tribu aurait pu construire son propre tabernacle.
La Torah rejeta toutes ces options car seule une œuvre collective peut, en fédérant les énergies, créer des liens suffisamment forts pour assurer la cohésion d’une communauté. Ce principe fut souvent appliqué par nos rabbins : lorsque Rav Kadouri décida de créer sa Yechiva, un philanthrope se proposa de la financer en totalité afin d’éviter au Rav la fatigue inhérente à la recherche de financements. Ce dernier fut très reconnaissant mais refusa son offre car il voulait que le maximum de personnes puissent participer à cette Mitsva.
Une histoire vraie
Rabbi Jonathan Sacks z’l rapporte une célèbre expérience de psychologie sociale pour illustrer la puissance des liens créés par un œuvre collective : l’expérience de la “caverne aux voleurs”, menée dans les années 50 par Muzafer Sherif de l’Université d’Oklahoma. On peut en trouver les détails sur Internet, mais, en résumé, il organisa avec son équipe – dans un camp d’été en pleine nature (le Robbers Cave State Park) – deux groupes d’enfants pré-adolescents qui, pendant une semaine, participèrent indépendamment à de multiples activités afin que chaque groupe assure sa cohésion.
Après une semaine, Sherif met les deux groupes en contact et organise des compétitions qui ne tardent pas à créer des frictions. Malgré plusieurs tentatives de conciliation, la tension monte entre les deux groupes et les bagarres se multiplient.
Finalement, Sherif crée des situations où les deux groupes sont menacés par un danger commun (réparer l’alimentation en eau du camp, sortir d’une ornière le camion de ravitaillement…). Les enfants acceptent alors de coopérer à la recherche de solutions, et les tensions s’apaisent.
Sherif en déduisit que le meilleur moyen d’apaiser des groupes en conflit était de les fédérer dans un but commun ne pouvant être atteint qu’avec la coopération de tous.
Chabbat Chalom
Jean Guetta
Relu et mis en page par Tania Guetta