Parachat Chélah lékha

La michna (dans Sanhedrin 108a) énumère ceux qui n’auront pas droit au monde futur. On y trouve, parmi d’autres, les générations du déluge et de la tour de Babel, et aussi les explorateurs. Ces derniers font donc partie des plus grands mécréants, toutes générations confondues. Il est pourtant évident que LA faute des enfants d’Israël est incontestablement celle du veau d’or, survenue quarante jours à peine, après qu’ils aient reçu la Torah au mont Sinaï, et retrouvé un degré de spiritualité équivalant à celui d’Adam Harichon avant le péché ! « Adorer » un veau en or, danser autour de lui et s’en réjouir, l’idolâtrie est certainement un bien plus grave péché que celui des explorateurs et cependant toute cette génération aura droit au monde futur, mais non pas les explorateurs eux-mêmes ! Comment expliquer cela ?

          La michna (dans Taanit 26a) nous enseigne que cinq événements ont eu lieu le dix sept Tamouz et cinq autres le neuf Av. Le 17 Tamouz a vu, entre autres, la faute du veau d’or et les Tables de la Loi brisées, le 9 Av la faute des explorateurs et le décret d’interdiction, à la génération du désert, d’entrer en terre d’Israël. Le 9 Av est aussi le jour de la destruction des premier et deuxième Beth Hamikdach. Il est surprenant que la date des explorateurs (9 Av) ait été retenue pour la destruction des deux Temples, plutôt que celle du 17 Tamouz, date du veau d’or.

A propos de la michna (Avot ch 5), qui déclare que le peuple d’Israël s’est rebellé dix fois contre l’Eternel, le Maharal de Prague (Derekh ‘Haïm ch 5) détaille deux d’entres elles, la faute du veau d’or et celle des explorateurs, et le lien qui les relie ! Lors du veau d’or :« ils dirent voilà tes dieux, ô Israël, qui t’ont fait sortir du pays d’Egypte » (Chémot XXXII, 4). Ces hérétiques ont renié l’Eternel, abjurant leur foi ! Au retour de leur mission, les explorateurs dirent : « nous ne pouvons pas marcher contre ce peuple parce qu’il est plus fort que Lui » (Bamidbar XIII, 31 d’après Sotta 35). Ces infidèles ont également renié l’Eternel et porté atteinte à Sa grandeur ! C’est au fond la même attitude blasphématoire, à la racine du mal. Si les enfants d’Israël n’avaient commis qu’une seule faute, l’une ou l’autre, poursuit le Maharal, ils n’auraient pas été ainsi punis. Au moment du veau d’or D… avait dit à Moché : « Je pardonne selon ta demande ». Mais à condition qu’ils ne renouvellent pas ce genre de faute, car « Le jour où J’aurai à sévir, Je leur demanderai compte de ce péché » (Chémot XXXII, 34).

Le 9 av, au retour des explorateurs, c’est le souvenir du veau d’or qui se réactive, et c’est pour cela que ce jour est plus dramatique et qu’il verra la destruction des deux Temples. Les explorateurs n’ont pas droit au monde futur, car ils ont « réveillé en eux » la faute du veau d’or.

« Selon le nombre de jours que vous avez exploré le pays, autant de jours, autant d’années vous porterez la peine de vos crimes pendant quarante années » (Bamidbar XIV, 34). Pourtant ces hommes ne partirent en exploration qu’à la deuxième année de la sortie d’Egypte et ne restèrent dans le désert finalement que trente neuf ans ? C’est parce qu’il faut démarrer le compte à l’épisode du veau d’or, date à laquelle le décret avait été prononcé.

Le Chem Michmouel souligne qu’au veau d’or « ils se levèrent pour s’amuser », et nos Sages d’expliquer ici « une allusion à l’idolâtrie, au meurtre et aux relations interdites » (Rachi), les trois causes responsables de la destruction du premier Temple. Le deuxième Temple fut détruit à cause de la haine gratuite. La médisance (lachon haràh), faute des explorateurs, provient aussi en général de la haine gratuite. Mesure pour mesure, les enfants d’Israël, qui se sont rebellés contre l’Eternel, furent punis par la destruction du Temple, où résidait la Présence divine. Et puisqu’ils refusèrent de rentrer en terre d’Israël, ils en furent exilés par la suite.

Chabbat Chalom