Dans cette paracha de la semaine, Ki-Tavo, nous lisons les bénédictions (ou les malédictions), promises à l’accomplissement (ou aux transgressions) des commandements de la Torah. Dans le Talmud (Méguila, 31b) Rabbi Chimon ben Eleazar nous enseigne qu’Ezra Ha sofer, qui a établi quelle partie de la Torah lire chaque semaine à la synagogue, a instauré la lecture de ce passage avant Roch Hachana, afin que se terminent l’année et ses malédictions, et que puisse commencer la nouvelle année avec toutes ses bénédictions.
Une de ces bénédictions inscrites dans la Torah est que : « L’Eternel te mettera à la tête et non à la queue (léroch vélo lézanav) », (Dévarim XXVIII, 13). C’est aussi le souhait, que nous formulons au diner, le soir de Roch Hachana, lorsque nous mangeons de la tête d’un mouton ou à défaut celle d’un poisson (Choulkhane Aroukh Or ha’haïm ch 583,2).
Mais quelle est la véritable signification de cette prière ? Est-ce si important pour l’homme d’être à la tête plutôt qu’à la queue ? De toute façon, que la tête décide de se rendre ici ou là, le corps et la queue suivent et s’y retrouvent également ! Il vaudrait peut-être mieux demander tout simplement que la tête nous mène aux bons endroits ! Est-il possible d’être tous à la tête, sans relation conflictuelle entre nous ? La michna dans Avot (ch IV mich.15) ne nous recommande-t-elle pas au contraire d’être à la queue des lions et pas à la tête des renards ?
Le Rav Chimchon Pinkous zatsal dans ses explications, nous rappelle tout d’abord, que la tête représente le centre de commandement, pour réfléchir, mesurer et décider de la conduite à tenir, du chemin à emprunter. La queue, elle, ne fait que suivre passivement, sans raisonner, ni décider de quoi que ce soit. Dans la vie de tous les jours, selon les circonstances, certaines personnes ne font que copier et suivre les autres, comme les wagons suivent la locomotive. Les wagons, encore rattachés, peuvent donner l’illusion qu’ils poussent la locomotive ; mais une fois détachés, ils sont bien vite à l’arrêt, alors que la locomotive, indépendante, s’éloigne rapidement.
Un homme peut observer correctement les mitsvots, sans que sa conduite n’ait de valeur singulière. Il peut même avoir beaucoup étudié et accompli nombre de Mitsvots, mais au Ciel on lui fera remarquer : « tu n’as fait que suivre ton entourage et subir son influence, tu n’es qu’une queue qui a suivi les autres ». Ce que D… nous demande c’est de l’initiative, la volonté d’agir par nous-mêmes, selon notre compréhension personnelle, et de décider la meilleure façon de le servir, bien entendu dans le cadre défini par la Torah.
L’homme s’habitue rapidement à tel mode de vie ; il pense qu’il l’a façonné à son caractère, alors que le plus souvent, il n’a fait que suivre aveuglement son entourage, lequel, lui, représente la tête. Parfois même après une période initiale réfléchie, il va poursuivre les mêmes comportements, des années suivantes, mais par habitude, machinalement. Dans ses bénédictions, la Torah souhaitent que nos actions soient volontaires, intentionnelles, et décidées jour après jour, avec de nouvelles ambitions dans une création personnelle.
Etre à la queue de ces lions, que sont les Sages et les grands de la génération, c’est profiter de leurs connaissances, de leurs expériences, de leurs analyses, pour nous projeter plus en avant. Il faudra, à leur exemple, entreprendre de par nous-mêmes, rajouter notre touche personnelle, qui fera de nous une réelle locomotive.
C’est ce que l’Eternel demande à Adam Harichon (Béréchit III, 9) : « Ayéka ?» où es tu ? Ou encore, où en es-tu ? Une question que chacun d’entre nous doit se poser, à l’approche de ce jour de jugement annuel, Rosh Hachana. Qu’ai-je fait de par moi-même cette année passée, de quelle manière, de quelle qualité, où et comment dois-je m’améliorer, quels sont mes projets d’avenir ?
Chabbat Chalom Oumévorakh