« Moché et Aaron montèrent (sur le mont Sinaï), accompagnés de Nadav, d’Avihou et des soixante-dix anciens d’Israël. Ils contemplèrent le D… (Elokim) d’Israël. Sous Ses pieds, comme un ouvrage en briques de saphir, et comme l’aspect du ciel, en limpidité. » (Chémot XXIV, 9-10)
D’après Iben Ezra ce fut une « apparition par prophétie » car ils avaient atteint ce jour-là de hauts niveaux spirituels. Pourtant, le Midrach (Rabba 15,24) rapporté par Rachi dit qu’ils étaient passibles de la peine de mort, pour avoir regardé, et contemplé. Mais le Saint Béni-soit-Il n’a pas voulu troubler la joie de la Torah, et a reporté la sanction : pour Nadav et Avihou, au jour de l’inauguration du Michkan (Vayikra X, 2), et pour les anciens d’Israël jusqu’au moment des plaintes du peuple (les Mitonénim), alors « le feu de l’Eternel sévit parmi eux, et déjà il dévorait les dernières lignes (Biktsé) du camp » (Bamidbar XI, 1). Biktsé peut s’interpréter « Biktsinim », les nobles du camp.
Quelle était précisément leur faute, à ces anciens, ces« nobles parmi les enfants d’Israël (sur lesquels) Il ne porta pas la main (jusque-là) ? C’est qu’Ils contemplèrent D… et ils mangèrent et ils burent. » (Chémot XXIV, 11). Rachi explique : « Selon le midrach Tanhouma, ils L’ont regardé avec une effronterie, qui leur venait d’avoir mangé et bu. Quant au Targoum (traduction) d’Onkélos, il ne traduit point ainsi, mais : Ils se réjouissaient de leurs sacrifices qui avaient été acceptés et agréés, comme s’ils mangeaient et buvaient. »
D’après le midrach Tanhouma, on comprend bien pourquoi ils étaient passibles de la peine de mort, mais d’après Onkélos cela reste une énigme. Car peut-on leur reprocher de se réjouir d’avoir accompli une Mitsva, qui a été agréée par l’Eternel ? Ne doit-on pas servir l’Eternel avec joie ?
Le rav Meir Hadach zatsal (Or Meir) répond que même lorsqu’il atteint des degrés élevés de spiritualité, l’homme doit toujours aspirer à s’élever davantage. En apparence, les anciens d’Israël se réjouissaient de la Mitsva d’avoir apporté un sacrifice agréé, mais l’Eternel, qui sonde les cœurs, a noté qu’ils étaient satisfaits d’eux-mêmes, et n’avaient aucune volonté d’en faire plus. Ils n’ont pas prié D… de les rapprocher, de les hisser encore plus haut. C’est cette image que décrit Onkélos, il s’agissait d’une joie « comme s’ils mangeaient et buvaient ».
David Hamélékh avait lui, demandé : « Ô D… crée en moi un cœur pur, et fais renaître dans mon sein un esprit droit. » (Téhilim LI, 12). Le Méiri explique que la supplication du roi David était que le mauvais penchant n’ait pas de prise sur lui, comme il est dit : « J’épancherai sur vous des eaux pures (…) Je vous donnerai un cœur nouveau (…) J’enlèverai le cœur de pierre de votre sein et Je vous donnerai un cœur de chair. » (Yéhézkel XXXVI, 25-26).
Sur ce verset, le Midrach Tanhouma (Béhaalotékha 10) écrit : « Les enfants d’Israël demandèrent à l’Eternel : Maître du monde, Tu sais combien est fort le mauvais penchant. L’Eternel répondit : Ecartez-le un tout petit peu de vous dans ce monde et Je l’enlèverai complètement par la suite ; Je le déracinerai de vous, dans les temps futurs. »
David Hamélékh avait lui, d’emblée, souhaité que l’Eternel lui retire entièrement son mauvais penchant. Il voulait déjà atteindre le degré des enfants d’Israël au moment de la délivrance, de la Guéoula finale.
Le rav Hadach ajoute que la source de leur erreur est de n’avoir pas perçu que l’homme ne peut progresser sans l’aide du Ciel. D’une manière générale, l’homme hésite à demander et renonce à ce qui est au-dessus de ses forces. Mais lorsqu’on s’imprègne de l’idée que tout vient d‘en Haut, dès lors sans aucune limite, l’homme peut tout demander à son Créateur, qui l’aidera à accéder aux plus hautes spiritualités.
Chabbat Chalom Oumévorakh