« Or Israël préférait Yossef à ses autres enfants, parce qu’il était le fils de sa vieillesse (ben zékounim hou lo) » (Beréchit XXXVII, 3). Le Targoum Onkelos traduit « ben zékounim » par « le fils de son intelligence », car Yaakov avait transmis à Yossef tout ce qu’il avait appris à la Yéchiva de Chém et Ever, et lui avait révélé des secrets de la Torah. Mais Rachi rapporte une autre explication, à savoir que les traits du visage de Yossef (ziv ikounim) ressemblaient à ceux de son père.
Est-ce vraiment parce Yossef lui ressemblait physiquement que Yaacov le préférait à ses autres fils ? Yaakov, le troisième de nos patriarches, àmoud hamérkava (pilier du trône céleste), ne donnait certainement pas autant d’importance à leur seule similitude d’apparence!
Le Béér Yossef explique, en référence à la guémara (Houlin 91b), que le visage de Yaakov était gravé sur l’un des quatre piliers du trône céleste. Dans son « rêve de l’échelle », dressée de la terre jusqu’au Ciel, Yaakov avait vu que « les anges de D… montaient et descendaient le long de cette échelle » (Beréchit XXVIII, 12). Ces anges, qui montaient jusqu’au trône céleste, se retrouvaient face au visage gravé de Yaacov, qu’ils contemplaient, puis redescendaient pour le comparer à celui de Yaacov (endormi) sur terre. C’est pourquoi Yaakov s’était dit, que si son fils lui ressemblait, et donc ressemblait aussi au visage gravé du trône de l’Eternel, c’est qu’il était certainement d’un très haut niveau spirituel, et c’est pour cela qu’il l’aimait préférentiellement.
Le Béér Yossef rajoute que dans la guémara (‘Haguiga 13b) il est rapporté une contradiction entre les versets, à propos des ‘Hayot, ces créatures du trône céleste. Il est tout d’abord écrit : « Quant à la forme de leurs visages, elles avaient toutes quatre une face d’homme, et à droite une face de lion (…) une face de taureau à gauche et toutes quatre une face d’aigle » (Yé’hézkel I, 10), mais plus loin le verset reprend : « La face du premier était une face de chérubin, la face du second une face d’homme, du troisième une face de lion, du quatrième une face d’aigle » (Id. X, 14). Dans ce dernier verset la face du taureau n’apparait pas, elle est remplacée par celle du chérubin. Rech Lakich explique que lorsque Yé’hézkel vit la face du taureau, il s’exclama : « Maitre du monde ! L’accusateur (le taureau qui rappelle la faute du veau d’or) pourrait-il être l’avocat de la défense ? Le chérubin est alors venu prendre la place du taureau. Le chérubin, poursuit la Guémara, c’est un enfant. Ils se trouvent donc, porter le trône céleste, une face de chérubin, une face d’homme (celle de Yaacov), une face de lion, et la face d’un aigle.
Le visage de cet enfant est celui de Yossef, qui est appelé dans notre paracha « enfant » (Id.2). Yossef était donc représenté aux côtés de son père, supportant le char céleste, et cette proximité justifiait la préférence.
Paradoxalement le taureau, remplacé, faisait également référence à Yossef. Le taureau est son emblème, comme il est dit : « Le taureau son premier-né, qu’il est majestueux ! » (Dévarim XXXIII, 17).
Au moment du don de la Torah, le ciel s’ouvrit et les enfants d’Israël virent la Mérkava céleste et … le taureau. Lorsqu’Aharon jeta l’or dans le feu, il en sortit le veau d’or ! C’est que le Erev-rav avait jeté, en même temps, la plaque en or sur laquelle Moché avait inscrit « alé chor, alé chor : que monte le taureau, qu’émerge le taureau ! » Cette plaque, Moché l’avait utilisée, à la sortie d’Egypte, pour récupérer le cercueil de Yossef, que les égyptiens avaient plongé dans les eaux du Nil,(Chémot Rabba 42).
Lorsque Yéhézkel pria pour que la présence du taureau sur le char céleste ne soit pas accusatrice, c’est tout naturellement le visage de Yossef qui devait le remplacer.
Chabbat Chalom Oumévorakh et ‘Hanouka Saméa’h