Le deuxième Beth Hamikdach a été construit sur les ruines du premier. Les Sages de la Grande Assemblée (Anchei kenesset haguedola) ont donc facilement retrouvé le lieu exact où il devait être édifié, mais persistait le doute quant à l’emplacement du Mizbéa’h, l’autel des sacrifices. Celui-ci devait être reconstruit à l’endroit même du précédent, à cette place hautement symbolique, d’où avait été prélevée la terre utilisée pour créer le premier homme, Adam. C’est là aussi qu’Adam, que Caïn et Hévél, que Noa’h avaient fait leurs sacrifices. C’était aussi le lieu de la Akedath Yits’hak (Rambam Beth Habé’hira ch2, 2). Mais après soixante-dix ans d’exil, il ne restait pas de témoin à consulter, pour résoudre le problème. C’est alors, nous dit la Guémara (Zevahim 62a), qu’ils virent les cendres de Yits’hak, de la Akéda, et qu’ils purent ainsi construire l’autel au bon endroit.
Les cendres de Yits’hak ? Mais il n’a été ni sacrifié, ni brûlé ! C’est un bélier qui fut immolé à sa place ! Les commentateurs rapportent qu’Abraham sacrifiant le bélier, priait à chacun de ses gestes : « … que cet acte soit accepté comme s’il était fait sur mon fils, comme si mon fils avait été égorgé, que son sang ait été aspergé, sa peau enlevée, comme s’il avait été consumé et réduit en cendres » (Rachi Béréchit XXII, 13). Et cela lui fut compté comme si les cendres du bélier étaient celles de son fils Yits’hak.
Pourtant, dans notre Paracha, à propos du verset : « il l’immolera au côté de l’autel, au nord (Tsafona), devant le Seigneur ; et les fils de Aharon, les prêtres, aspergeront de son sang le tour de l’autel » (Vayikra I, 11), le Midrach (Tana Débé Eliahou) enseigne que lorsque les enfants d’Israël liront ce verset, D… se souviendra du bélier de la Akédath Yits’hak. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce verset est mentionné dans la prière du matin (Beth Yossef), aussitôt après avoir rappelé le « sacrifice d’Yits’hak ». Pourquoi donc, D… se souviendrait-Il cette fois-ci du bélier plutôt que de Yits’hak lui-même ? On peut également s’interroger sur la particularité de ce verset, choisi en référence, pour rappeler la Akéda ?
Le Maharil Diskin zatsal relève, que ce lieu du sacrifice O’la, au nord, n’a pas été précisé lorsque la Torah a évoqué « un holocauste (O’la) pris dans le gros bétail ». Le nord ne sera mentionné, pour la première fois, qu’à propos de « l’holocauste de petit bétail » … notre verset de référence. Pour le sacrifice de « ‘Hatat » la Torah se rapportera également à ce verset : « il égorgera le sacrifice expiatoire (‘Hatat) à l’endroit de l’holocauste (‘Ola) » (idem IV, 24/29). A l’endroit, c’est-à-dire au nord ! Pourquoi cette mention, qui est la règle pour tous les sacrifices de « haut degré de sainteté » (Kodshé Kadashim), n’est inscrite que dans notre verset « prototype » ?
Le Rav répond que jusqu’à la Akédat Yits’hak, la chéhita du sacrifice se faisait sur l’autel lui-même ; c’est la raison pour laquelle Abraham « attacha son fils, et le plaça sur l’autel, par-dessus le bois », prêt à l’égorger. Mais lorsque D… lui dit de ne pas l’immoler, « Abraham levant les yeux, remarqua un bélier, derrière lui, qui s’était embarrassé les cornes dans un buisson » (Béréchit XXII, 9 /13). Abraham le prit et l’égorgea, avant même de détacher son fils ! Sur place, au nord de l’autel, il s’empressa de le faire, de peur que le bélier ne se blesse, et ne devienne inapte au sacrifice. C’est pour rappeler ce jour que l’emplacement au nord du Mizbéa’h fut choisi, et pour évoquer l’empressement d’Abraham, son désir et son souci d’accomplir la Mitsva comme il se devait.
Le bélier sacrifié par Abraham à la place de Yits’hak était un Korban ‘Ola, un holocauste, « un holocauste de menu bétail », pour lequel la Torah va donc réserver la mention précise du nord, qui fait allusion à cette conduite exemplaire d’Abraham. C’est pourquoi conclut le Rav, D… se souviendra du bélier et de ce qui lui aura été fait par Abraham Son serviteur zélé.
Chabbat Chalom Oumevorakh